Table des matières
- Combiner engagement et rémunération via un levier transverse
- Les enseignements de l’Expérience Collaborateur
- Décorréler système financier et fonction : la rémunération indirecte plus efficace
- Comprendre l’échelle de motivation
- Le support d’un SIRH au développement d’une culture d’entreprise
- Favoriser l’acquisition des compétences
Tout DRH ou manager a été confronté à ces situations : un alternant très engagé perdant sa motivation au travail une fois embauché en CDI ; un collaborateur ayant eu de l’intérêt pour son activité pendant un certain temps pour, finalement, ne rester dans l’entreprise qu’à cause du rapprochement d’une prime d’ancienneté ; des équipes commerciales passionnés par le produit qui connaissent une déliquescence de leur motivation pour le client suite à l’instauration d’incentives axés sur la quantité plutôt que la qualité.
Les exemples sont nombreux pour démontrer qu’un système ritualisé de reconnaissance financière dénature la relation entre le collaborateur et la fonction. Comment sortir alors d’un processus purement financier sans perdre en performance ? Quels leviers l’entreprise peut-elle développer en matière de recrutement, d’engagement et de fidélisation ? Comment concilier investissement et rentabilité sans dissoudre le lien fusionnel/passionnel entre le collaborateur et l’activité ? Une réponse possible : apprendre à distinguer des collaborateurs en motivation intrinsèque et/ou extrinsèque avec toutes les sous-catégories afférentes, pouvant aller jusqu’à l’amotivation.
Combiner engagement et rémunération via un levier transverse
La prime d’ancienneté, instaurée en 1973, avait pour objectif de fidéliser les collaborateurs. Dans certains métiers, elle représente jusqu’à 25% de la rémunération, ce qui est, en effet, énorme. Rester en poste alors que le travail ne fait plus sens constitue une aberration. L’entreprise et les managers devraient travailler de concert sur d’autres leviers d’engagement et de performance. Par exemple en imaginant un fixe et une part variable pour tout poste de l’entreprise, sans que le pourcentage variable ne soit bordé de façon stricte, mais en l’alignant de façon exceptionnelle sur la constatation de bonnes pratiques. En transformant ainsi cette démarche en un axe possible de rémunération à disposition des managers, l’entreprise apporte de la valeur car elle impacte les collaborateurs de façon transverse, sans pour autant institutionnaliser un processus.
Les enseignements de l’Expérience Collaborateur
Le Baromètre 2021 Parlons RH démontre que les entreprises ayant développé une Expérience Collaborateur pendant les confinements sont celles qui s’en sont le mieux tiré. En 2 ans (2019-2021), la prise de conscience de cet indicateur a grimpé de 25% à 43%. Les 3 sujets principaux identifiés dans le baromètre concernent dans l’ordre :
- L’intégration (74%),
- Le management (49%)
- La mobilité (34%)
- La communication interne (33%).
- La rémunération arrive en avant-dernière position avec le dialogue social (7%)
La QVT n’y figure pas, or l’Expérience Collaborateur couvre un champ opérationnel très vaste. Ce constat parle de lui-même : non seulement le sujet de la rémunération n’est pas au centre des préoccupation des salariés, mais en plus il est responsable de situations délétères sur la performance !
Décorréler système financier et fonction : la rémunération indirecte plus efficace
On risque d’observer la déliquescence de motivation au travail d’un collaborateur passionné dès qu’il est confronté à un système de rémunération financière axé sur la seule performance. L’engagement serait-il alors impacté quand l’entreprise instrumentalise plaisir et travail ? En distillant des primes non institutionalisées, l’entreprise ne permettrait-elle pas au collaborateur de conserver sa notion de « self » ? Changer la relation à la fonction représente un vrai sujet en matière de politique de rémunération.
Ainsi, l’incentive peut s’avérer destructeur à long terme. Imaginons une équipe de commerciaux rétribuée sur l’enrichissement d’une base de données clients. La gouvernance place le focus sur un indicateur de qualité de la donnée. Le jour ou cet incentive disparait, le niveau de qualité chutera. Systématiser ou automatiser une tâche n’est pas un gage d’engagement pérenne.
Si la démarche demande un investissement psychologique, de l’attention et de l’adaptation, l’approche financière pourra entacher l’investissement émotionnel du collaborateur.
Et si l’employeur sanctionne ou rémunère mal sans pour autant développer de sens, le désengagement sera encore plus rapide. La rémunération indirecte sera plus pertinente car moins ritualisée, moins perçue comme étant un dû. Développer des leviers autres que financiers nécessite cependant un management adapté, l’instauration d’une culture d’entreprise inscrite dans le long terme.
Comprendre l’échelle de motivation
Tout système performant de recrutement ou d’onboarding devrait tenir compte d’une notion d’échelle. Ainsi, la grille de Deci & Ryan compte six stades allant de l’amotivation à l’autodétermination et permet de cerner finement les talents de l’entreprise :
- L’amotivation est l’absence totale d’engagement pour la fonction.
- Le collaborateur en motivation extrinsèque externe répond à une pression sociale, à l’attente d’une rémunération mais sans attrait particulier pour la fonction.
- Le collaborateur en motivation extrinsèque introjectée fait face à une obligation inhérente au fonctionnement de l’entreprise qui le contraint à se conformer.
- En motivation extrinsèque identifiée, le collaborateur perçoit l’utilité d’une démarche, le développement de compétences réutilisables.
- En motivation extrinsèque intégrée, la fonction fait sens : l’entreprise laisse les coudées franches au collaborateur et génère un levier de reconnaissance.
- La personne motivée intrinsèquement a sa propre énergie et des choix personnels qui augmentent ses aptitudes.
Il faut être très attentif à l’individu pour comprendre sa potentielle baisse de motivation sur l’échelle. Le but est d’anticiper éventuellement un passage du mode introjecté externe à l’identifié/intégré. L’entreprise devrait ainsi centrer ses recrutements en imaginant une Expérience Collaborateur mixant envie, sens et capacité de projection.
Le support d’un SIRH au développement d’une culture d’entreprise
La RH se doit de mieux processer son recrutement ou sa mobilité interne et identifier les postes les plus en adéquation avec les aspirations des talents et collaborateurs. Quid d’un système de recrutement qui intégrerait une évaluation du schéma motivationnel sur les tâches ? L’entreprise sait-elle s’outiller pour répondre à ce sujet ? Les attentes vis-à-vis d’une culture RH sont différentes selon les collaborateurs et les entreprises. Un SIRH performant doit permettre d’identifier les talents ayant un « self », par mission, compétence ou activité. L’entreprise doit avoir la capacité d’y répondre. La motivation extrinsèque identifiée répond par exemple à une logique de formation. Il faut donc aller vers une analyse plus fine et moins caricaturale de l’individu.
Onboarding, qualification, people review, politique de gestion des talents, plans de progression, plans de succession, entretiens annuels et professionnels… la RH doit viser plus large que le seul recrutement. Elle dois fournir les bons outils informatiques à des managers acculturés au pilotage, à l’analyse et au suivi des données. Ces derniers seront pertinents s’ils arrivent à partager une vision et à maîtriser la notion de motivation au travail, par exemple en attirant l’attention des collaborateurs sur des bénéfices autres que financiers, tels que la QVT (Qualité de Vie au Travail), dans le cadre d’une Expérience Collaborateur globale.
Favoriser l’acquisition des compétences
L’obtention d’une prime régulière n’est plus en phase avec les attentes des nouveaux talents, avides de progression. A cet effet, le SIRH HRMAPS propose un module de suivi d’acquisition des compétences permettant de cartographier la progression des collaborateurs. Ces derniers peuvent être affectés à des tâches à forte valeur ajoutée et ancrer une véritable démarche agile dans l’entreprise.
Ainsi, peut-être, l’entreprise évitera de cantonner ses salariés dans une zone de confort pouvant être paralysante dans le long terme.
Loïc CLAIRE
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Consultant RH depuis 1998.
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Psychologue spécialisé en ingénierie des organisations et de la formation.
Loïc bénéficie de plus de 20 ans d’expérience dans la mise en place et/ou l’optimisation des processus RH (recrutement, mobilité, gestion des talents, GEPP, …). Il accompagne les clients HRMAPS de l’audit des processus en vigueur dans l’entreprise à la mise en production de l’outil SIRH.